| Vie municipale→histoire
Ce prêtre érudit et méthodique avait eu l’opportunité d’explorer les archives du château mais cette précieuse documentation ne nous est malheureusement pas parvenue et nous ignorons le sort qui lui a été réservé. L’occupation du site de Mauvezin est ancienne et paraît antérieure au XIIIe siècle, époque où le château et l’église ont été construits. En effet, plusieurs indices, principalement d’ordre archéologique, semblent le prouver : une hache polie a été recueillie sur le territoire de la commune il y a quelques décennies de cela, et l’existence d’un tumulus situé près de la Gupie, dans la prairie de l’Artonis, détruit vers 1865 sans avoir été étudié, a été signalée.
En 1984, la municipalité de Marmande qui venait d’acquérir des parcelles du site du château, chargea Jacques Clémens de localiser précisément son emplacement, puis de mettre en place un chantier de sauvetage. Dans la mesure où rien n’a subsisté de sa destruction qui est intervenue dans le courant des années 1930, il a fallu confronter les plans cadastraux anciens et les relevés de l’architecte Charles Bouillet qui figurent dans le livre de l’abbé Alis. Ces éléments et les repérages effectués sur le terrain ont permis de confirmer que l’essentiel des vestiges du château se trouvent sur une propriété privée voisine. Un sondage a été nécessaire à l’emplacement d’une tour rectangulaire qui s’avançait sur le terrain municipal et dont il ne subsistait qu’un élément d’assise. Au centre du soubassement de la tour, a été mise au jour une sépulture qui, associée à d’autres indices, incite à penser que le château s’est implanté sur l’emplacement d’un cimetière. Des sarcophages ont été découverts lors de sa démolition ainsi que des ossements humains lors de ce sondage de sauvetage. L’abbé Alis indique qu’une chapelle a été construite au XVIe siècle à la place d’une tour démolie pendant la guerre de Cent Ans, et une tradition atteste que les seigneurs se faisaient enterrer dans l’église paroissiale.
2 ) Un castelnau
Les circonstances de la naissance du bourg de Mauvezin sont importantes pour l’histoire de l’occupation du sol et du peuplement. Le bourg s’inscrit en effet dans le mouvement d’organisation des terroirs et de groupement de l’habitat en villages ou en villes qui caractérise la France méridionale et l’ensemble de l’Europe dès le XIIe siècle. La situation du château par rapport au village semble révéler la volonté seigneuriale de « barrer » le promontoire au profit d’une communauté rurale qui était dispersée en hameaux.
Le bourg, probablement après le XIIIe siècle, s’est doté d’une enceinte avec quatre tours rondes et deux portes d’accès dont il ne subsiste pratiquement aucun vestige, renforçant ainsi la défense naturelle du site. On ignore tout du seigneur qui a décidé de structurer la paroisse de Mauvezin et qui est à l’origine de cette initiative urbanistique. S’agit-il d’Hugues de Malvoisin, le premier seigneur connu, ou de son contemporain Robert de Malvoisin (ou Robert Mauvoisin), fidèle compagnon de Simon de Montfort lors de la croisade contre les Albigeois au début du XIIIe siècle, qui s’empara de Marmande en 1212 et en 1218 ? L’abbé Alis pense que Mauvezin a vu son destin se définir après la seconde prise de Marmande. Jouissant d’un prestige éclatant, Robert de Malvoisin reçut peut-être tous les biens confisqués à Hugues de Malvoisin dans le Marmandais, parmi lesquels figurait la baronnie qui porte son nom. Peut-être est-ce lui enfin qui a fait construire l’église et le château.
L’implantation du château sur le promontoire n’est pas due au hasard : elle s’explique non seulement par le point de vue exceptionnel sur la vallée de la Gupie, véritable frontière militaire au Moyen Age entre l’Agenais et le Bazadais, mais aussi par l’utilisation architecturale d’un affleurement calcaire appelé localement « tuf », réputé pour sa relative dureté et peu intéressant sur le plan agricole. Ce tuf a été taillé et a servi de fondation non seulement au château mais aussi à l’église.
On peut donc supposer qu’une église et un cimetière ont existé sur le promontoire à l’emplacement du château, qu’un seigneur se serait « emparé » de la paroisse au XIIIe siècle, lui aurait donné son nom et l’aurait restructurée en seigneurie. « Mauvezin appartient donc à ces nombreux castelnaux, écrit Jacques Clémens, c’est-à-dire à ces habitats groupés ou subordonnés à un château qui apparaissent en Aquitaine aux XIIe et XIIIe siècles. »
3 ) Commune et paroisse Au XIIIe siècle, la juridiction de Mauvezin s’étendait sur le territoire de deux paroisses : Saint-Pierre de Marteruch, qui était la plus grande, et Saint-Martin d’Artus, toutes deux dans le diocèse de Bazas. Ces paroisses sont peut-être nées entre l’Antiquité tardive et le haut Moyen Age, comme la grand majorité d’entre elles, périodes troublées pour lesquelles les informations ne sont pas très abondantes. Certaines sources indiquent qu’il y aurait eu une bastide à Artus. En effet, en 1278, Luc de Thanney, sénéchal de Gascogne du roi d’Angleterre Edouard 1er, fit construire une bastide dans la juridiction de Mauvezin, contre la volonté du seigneur, Hugues de Malvoisin. Dans le document en question, la bastide n’est pas nommée et les historiens pensent qu’il s’agirait d’Artus, à moins qu’il n’y ait eu deux bastides dans la juridiction, ce qui paraît peu probable. En 1289, Edouard 1er accorda une charte de coutumes à Artus, pareille à celle de Castelnau-sur-Gupie qui l’avait eue en 1276. Nous ignorons si la fondation de cette bastide s’est réellement concrétisée ou si elle a avorté. En tout cas, il n’en subsiste plus aucune trace aujourd’hui. Jusqu’à la Révolution, la paroisse de Mauvezin, qui portait tantôt le nom de Saint-Pierre de Marteruch, tantôt celui de Saint-Pierre de Malvoisin, le plus fréquemment employé, relevait, sur le plan administratif de la sénéchaussée de Bazas. La paroisse de Saint-Martin d’Artus, devenue son annexe au début du XVIIe siècle, a été supprimée sous la Révolution : elle le sera définitivement en 1803 et son église a été entièrement démolie dans le courant du XIXe siècle. En 1792, Mauvezin a conservé son titre de cure et a été rattachée au diocèse d’Agen. Quand les départements ont été créés en 1790, la nouvelle commune a été intégrée à celui du Lot-et-Garonne, dans l’arrondissement de Marmande et le canton de Seyches. Commune associée à Marmande à partir de 1972, elle a retrouvé sa complète autonomie en 2003.
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